L'AFFAIRE ROSA BONHEUR CONTRE POURCHET: LE REFUS D'EXECUTER UNE COMMANDE


En 1864, une affaire judiciaire oppose la célèbre artiste Rosa Bonheur à un riche négociant de Lyon nommé Pourchet. Ce conflit, qui porte sur la non-exécution d'une commande de tableau, soulève des questions importantes sur les obligations contractuelles des artistes et les droits des commanditaires.


Contexte de l'affaire

À la fin de l'année 1860, Pourchet sollicite Rosa Bonheur pour qu'elle réalise un tableau dans le style de ses œuvres célèbres. Rosa Bonheur accepte la commande, proposant un prix entre 8000 et 10000 francs, ce qui convient à Pourchet. Ce dernier affine ensuite sa demande en souhaitant un tableau représentant un attelage de chevaux et de bœufs ou un labourage.

Cependant, malgré les promesses de Rosa Bonheur, les mois passent sans que l'œuvre ne soit livrée. Finalement, Rosa Bonheur conseille à Pourchet de renoncer à sa commande, mais il insiste. En juin 1864, elle lui écrit qu'il n'obtiendra jamais son tableau. Devant cette situation, Pourchet assigne l'artiste en justice, réclamant soit la livraison du tableau, soit 15000 francs de dommages-intérêts.


Questions de droit soulevés

• Obligation de Faire : Rosa Bonheur avait-elle l'obligation de réaliser et de livrer le tableau commandé par Pourchet ? La question centrale est de savoir si son engagement initial constitue une obligation contractuelle ferme, malgré l'absence de date de livraison précise.

• Dommages-Intérêts : En cas de refus d'exécuter l'œuvre, Pourchet est-il en droit de réclamer des dommages-intérêts pour le préjudice subi, tant matériel que moral ?


La résolution

Le tribunal de Fontainebleau reconnaît que Rosa Bonheur avait bien pris un engagement contractuel, et, malgré le caractère artistique de la commande, elle doit livrer le tableau ou payer des dommages-intérêts. Le tribunal ordonne à Bonheur de livrer l'œuvre dans un délai de 6 mois, sous peine de payer 20 francs par jour de retard.

Rosa Bonheur fait appel de ce jugement. La Cour de Paris infirme le jugement de première instance, estimant que l'obligation de faire peut se résoudre en dommages-intérêts en cas de refus formel de l'artiste. La Cour condamne Rosa Bonheur à payer 4000 francs de dommages-intérêts à Pourchet, tout en lui laissant une dernière chance de livrer le tableau dans un délai de 6 mois.


L'affaire Rosa Bonheur contre Pourchet met en lumière les défis juridiques liés aux obligations contractuelles des artistes. Elle souligne que même les artistes de renom doivent honorer leurs engagements ou compenser les préjudices causés par leur non-exécution. Cette décision réaffirme l'importance de la clarté des conventions artistiques et la protection des droits des commanditaires.


𝘚𝘰𝘶𝘳𝘤𝘦 : Les Procès de l’Art – Céline Delavaux & Marie-Hélène Vignes


𝘐𝘭𝘭𝘶𝘴𝘵𝘳𝘢𝘵𝘪𝘰𝘯 : Roisa Bonhheur « Labourage ninivernais » 1849


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