L'AFFAIRE MAURICE DE VLAMINCK: AUTHENTIQUE OU FAUX


En 1953, une affaire judiciaire met aux prises le peintre Maurice de Vlaminck et le collectionneur Fernand Depas. Le litige porte sur l'authenticité d'un tableau intitulé "Champ de Blé", acheté par Depas, puis remis en question par Vlaminck lui-même, qui efface sa signature du tableau. Cette affaire soulève des questions cruciales concernant les droits d'auteur et la propriété d'œuvres d'art.


Contexte de l'affaire

Maurice de Vlaminck, ancien violoniste et coureur cycliste devenu peintre autodidacte, a connu la célébrité grâce à Ambroise Vollard. En 1953, Fernand Depas, qui a acheté un tableau de Vlaminck, souhaite le vendre à un prix beaucoup plus élevé. Pour obtenir un certificat d'authenticité, il confie le tableau à Jean Mettey, marchand de Vlaminck. À la surprise de Depas, Vlaminck déclare que l'œuvre est un faux et en efface sa signature.

Depas, convaincu de l'authenticité du tableau, assigne Vlaminck en justice, réclamant des dommages-intérêts pour la perte de valeur causée par la disparition de la signature et la saisie du tableau.


Les questions de droit posées

1. Droit de Propriété vs. Droit Moral : Depas revendique la restitution de la signature ou des dommages-intérêts pour la dévaluation de l'œuvre. Vlaminck, en revanche, invoque son droit moral, affirmant qu'il ne peut être contraint de signer une œuvre qu'il considère comme un faux.

2. Authenticité de l'oeuvre : Le tribunal doit décider si le tableau est authentique et si Vlaminck avait le droit d'en effacer la signature.


La résolution

Le tribunal de grande instance de Paris déboute Depas de son action contre les héritiers de Mettey et refuse de contraindre Vlaminck à signer l'œuvre. Cependant, il reconnaît que l'artiste a commis une faute en effaçant la signature et le condamne à verser des dommages-intérêts à Depas, en attendant la décision pénale sur l'authenticité du tableau.

Après la mort de Vlaminck en 1958, Depas poursuit ses héritiers en appel. En 1961, la cour d'appel de Paris confirme que Vlaminck a commis une faute en effaçant la signature, mais refuse d'imposer la restitution de celle-ci. La cour condamne les héritiers à payer 5000 nouveaux francs à Depas, sans trancher définitivement sur l'authenticité du tableau, laissant ainsi un doute persistant.


Conclusion

L'affaire Maurice de Vlaminck met en évidence le conflit entre le droit moral de l'artiste et le droit de propriété du collectionneur. Bien que la cour ait reconnu le préjudice causé par l'effacement de la signature, elle a évité de se prononcer sur l'authenticité de l'œuvre. Ce jugement reflète la complexité des litiges artistiques où la valeur des œuvres et la protection des droits d'auteur sont en jeu. La question de l'authenticité de "Champ de Blé" reste ouverte, peut-être à résoudre par de futurs contentieux et des expertises scientifiques modernes.


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